ABYDOS

Sanctuaire d’Osiris

Sa renommée incomparable naquit du rôle primordial qu’y joua le dieu funéraire Osiris dont c’était l’un des lieux de culte majeurs du pays, l’autre étant Bousiris dans le delta. Si l’ensemble du site est aujourd’hui très ruiné et peu spectaculaire, trois monuments n’en offrent pas moins aux visiteurs un témoignage de sa splendeur ancienne :

 

Histoire et mythe d'Abydos

LE TEMPLE DE SETHI Ier

Le nom de ce temple était : , c'est-à-dire :

Le château divin des millions d'années du Roi de Haute et Basse Égypte Menmaatrê.

 

Reconstitution JC. Golvin

 

Strabon le décrit comme un « palais admirablement bâti ». Ce temple, orienté face à l’est, bien conservé, dédié à plusieurs dieux, représente un monument funéraire à la gloire du pharaon qui l’a fait ériger. Il a la particularité d’être construit en forme de L et non de forme rectangulaire ; de plus, il possède deux salles hypostyles.

Séthi Ier.

Autrefois, le temple-cénotaphe était entouré par un mur avec, comme entrée principale, un premier pylône qui s’ouvrait au nord, tandis qu’une seconde porte donnait au sud sur le désert. Les deux entrées sont ruinées.

Plan du temple de Séthi Ier

Deux cours, dont la première est détruite, s’étendaient à l’avant des deux salles hypostyles. Celles-ci dont divisées en sept travées correspondant aux sept chapelles du sanctuaire, ce qui est exceptionnel en architecture égyptienne.

L’autre élément remarquable de cet ensemble architectural, c’est l’Osireion, situé à l’arrière du temple, juste dans son axe. De nombreux reliefs sur les murs, en bon état de conservation, sont des chefs-d’œuvre de l’art égyptien, tant par la finesse des modelés que par la perfection du trait.

On sait que Séthi Ier n’acheva pas la construction ; c’est Ramsès II qui la termina et fit édifier la partie avant du temple. Précisons qu’après « l’hérésie  amarnienne », le règne de Séthi Ier marqua de nouvelles formes artistiques qui introduisirent un nouveau style, celui des Ramessides.

Première cour

Dans le milieu de la cour, on voit deux puits entourés de murs. À gauche, des reliefs de Ramsès II représentent la célèbre bataille de Qadesh contre les Hittites ; on dénombre symboliquement les mains coupées aux ennemis tués ; on offre le tribut à Amon. Une rampe placée entre les deux puits, conduit à un portique à douze piliers qui précède la deuxième cour.

Deuxième cour

Des inscriptions et représentations concernent les actions de Ramsès II ; Ramsès offre un sacrifice aux dieux ; Ramsès massacre ses ennemis en présence d’Amon.

Une deuxième rampe permet d’accéder à un portique à douze piliers qui sert de façade au temple. Ramsès II fit murer quatre des sept portes. Sur les piliers, Ramsès est accueilli par différentes divinités :

Ramsès II est accueilli par Hathor et Isis.

 

Sur la gauche de l'entrée principale, au fond du portique, figure une grande inscription commémorant l’achèvement du temple par Ramsès II :

- à gauche, Ramsès II récite le texte qui est gravé devant lui.
- gravée sur 95 colonnes de hiéroglyphes, une grande inscription dédicatoire précise que dans la première année de son règne, lors d'un voyage à Abydos, Ramsès II descend le Nil et s'arrête à Abydos. Il voit l'état inachevé du temple de son père Séthi et décide de terminer l'oeuvre de son père en y ajoutant ses propres reliefs : "Je les ai fait graver au nom de mon père et en mon propre grand nom car le fils est comme son père".
- à droite, Ramsès II fait l'offrande de Maât à Osiris, Isis et à son père défunt Séthi Ier.

Grande inscription dédicatoire : Ramsès II fait l'offrande de Maât.

Première salle hypostyle

Première salle hypostyle.

Elle mesure environ 50 mètres sur 10 mètres. Elle est soutenue par 24 colonnes papyriformes à chapiteau fermé. Les représentations sur les fûts des colonnes sont en rapport avec celles de la chapelle située en arrière. Ramsès II y est représenté devant le dieu auquel est consacré la chapelle. Les dieux Horus et Thot baptisent le roi ; le roi est conduit dans le temple ; on apporte un coffret contenant les rouleaux de papyrus à Osiris, Hathor, Isis et Horus.

Scène de purification : Horus et Thot baptisent le roi.

 

Oupouaout du Sud et "Horus qui réside à Abydos" accompagnent le roi vers Hathor.

 

Deuxième salle hypostyle

On y accède par sept portes qui n’ont pas été murées. Trois rangées de douze colonnes divisent la salle en sept travées qui conduisent aux sept chapelles (deux rangées de colonnes papyriformes fasciculées à chapiteau fermé et une rangée de colonnes palmiformes).

Deuxième salle hypostyle.

À gauche et à droite, des piliers-djed datant de Séthi Ier représentent les symboles d’Osiris. Le roi y est montré ainsi : offrande à la déesse de la justice, Maât. Le roi pratique un encensement et une libation pour Osiris et Horus. Séthi est placé devant la chapelle d’Osiris, tenant à la main un encensoir, entouré de Maât, Isis, Nephtys, Imentet (la déesse de l’Occident) et de neuf autres divinités.

Séthi Ier pratique un encensement et une libation pour Osiris et Horus.

Le sanctuaire d’Osiris : les sept chapelles

Le fond du temple se compose non pas d’un sanctuaire unique comme c’est le plus fréquemment le cas, mais de sept chapelles. Ces chapelles, jadis fermées par des portes en bois, sont symboliquement divisées en deux parties : la partie avant contenait la barque du dieu ; la partie arrière, son image de culte.

Plan des chapelles osiriennes (Osiris.net).

De gauche à droite on reconnaît les chapelles suivantes : Séthi divinisé (Ga), Ptah (Gb), Rê-Horakhty (Horus dans l’horizon) (Gc), Amon-Rê (Gd), Osiris (Ge), Isis (Gf) et Horus (Gg). Sur les murs, apparaissent des représentations cultuelles et des scènes d’offrandes : sur le mur du fond, une stèle est dédiée à la divinité avec au plafond, étoiles et cartouches de Séthi.

Dans toutes ces pièces décorées par Séthi Ier, dont la plupart ont conservé leur plafond, rien ne séduit autant l’œil que ces reliefs finement ciselés dans un calcaire très pur. Tous les personnages possèdent, dans leurs attitudes, une grâce respectueuse et déférente. Ce qui transparaît toujours, c’est cette profonde piété du roi se courbant vers les dieux dans un geste de vénération : ici, l’art du relief atteint la perfection.

Les salles qui ont conservé leur polychromie prouvent quelle devait être la magnificence d’un sanctuaire égyptien au lendemain de son édification.

Chapelle de Sethi divinisé

 

Les âmes de Pé et Nekhen portent le roi assis sur un trône.
© T. Benderitter/www.osirisnet.net

Chapelle d’Amon-Rê

 

Vue de la barque processionnelle d'Amon-Rê, appelée Ouser-Hat.

Chapelle d’Osiris

La chapelle d’Osiris s’ouvre sur une salle osiriaque constituée de dix colonnes sans chapiteaux et ornée de scènes rarissimes retraçant certains épisodes du mythe osirien, notamment l’union divine d’Osiris et d’Isis pour concevoir le futur Horus.

 

Séthi fait une offrande des insignes de la royauté à Osiris.

 

Séthi pratique un encensement pour Osiris.
© T. Benderitter/www.osirisnet.net

 

 

 

À droite, trois petites chapelles sont consacrées au culte de Séthi devenu Osiris (Hc), Isis (Hb) et Horus (Ha).

Petite chapelle d’Isis : le dieu Oupouaout présente à Séthi Ier (hors champ) les insignes de la royauté

et le dieu Thot lui présente l’image des 2 Déesses Tutélaires, en vue de sa renaissance.
© T. Benderitter/www.osirisnet.net

 

Petite chapelle d’Horus : Horus faisant offrande des insignes de la royauté à Séthi.
La déesse Isis se tient debout derrière le roi, une main levée en signe de protection.

 

Petite chapelle d’Horus : Isis et Osiris.

 

Petite chapelle d’Horus : Séthi encense Horus.

Derrière ces chapelles, une salle est inaccessible (salle close). Sur la gauche, une petite salle à quatre colonnes et trois chapelles (détruites) jouxtent la grande salle, toutes anépigraphes.

Chapelle d’Isis

Chapelle d’Isis.

Les annexes

 

 

1 : Vestibule d'accès aux chapelles consacrées aux dieux Nefertoum et Ptah-Sokar-Osiris.

2 : Chapelle consacrée au dieu Nefertoum.

3 : Chapelle consacrée aux dieux Ptah-Sokar-Osiris.

4 : Corridor de 25m qui contient la Table des Rois.

5 : Escalier décoré par un tableau représentant Ramsès II à la chasse aux taureaux.

6 : Abattoir des bêtes de sacrifice ou Salle des Bouchers.

7 : Salle aux quatre piliers.

8 : Magasins.

9 : Reposoir des barques de procession.

On retourne à présent dans la deuxième salle hypostyle. Là, entre la chapelle de Séthi et le pilier-djed, une porte donne accès à la salle du dieu funéraire memphite Ptah-Sokaris (1), décorée avec trois colonnes. Sur les reliefs, on observe Séthi adorant le dieu des morts et d’autres divinités. Au fond, deux chapelles sont dédiées à Ptah-Sokaris (3) et Nefertoum (2).

Chapelle de Ptah-Sokar : la régénération d'Osiris
Sur le phallus en érection du dieu Osiris allongé, Isis, sous la forme d'une oiselle, se pose pour être fécondée et engendrer Horus.

A côté du pilier-djed, s’ouvre le couloir des rois qui mène aux autres pièces de l’aile du temple. Sur le mur droit on admirera le relief le plus connu et le plus célèbre du temple : les « Annales de Séthi Ier », également appelées les « Tables d’Abydos » . Séthi Ier, tenant à la main un encensoir, son jeune fils Ramsès devant lui, rend hommage à 76 rois, ses prédécesseurs ; La liste est divisée en trois rangées. Les deux premières lignes recensent les 76 rois qui, de Narmer (qui prit par la suite le nom de Ménès, c'est-à-dire «le fondateur»), premier pharaon de la Ière dynastie, à Séthi Ier, deuxième pharaon de la XIXe dynastie, ont régné sur l’Égypte ; ici, ne figurent ni les souverains de la IIe Période Intermédiaire ni les quatre pharaons de l’hérésie amarnienne, d’Akhénaton au Divin Père Ay. Quant à la troisième ligne, elle répète sur l’ensemble du tableau les cartouches de Séthi Ier.

Couloir des rois. Séthi Ier accompagné du jeune Ramsès, devant la liste des noms des 76 « ancêtres royaux ».

 

Séthi Ier et son fils Ramsès (détail).

 

Tables d'Abydos :

En haut à gauche  Snefrou , suivi de son fils Kheops ( Khoufou) .

La petite statuette d’Osiris assis sous le cartouche de chaque pharaon indique que le pharaon est mort.

 

On remarquera également dans le corridor qui conduit par un escalier à l’Osireion des scènes du culte d’Osiris, une très belle scène dépeignant le roi Ramsès II exerçant son fils aîné à dompter le taureau sauvage, ainsi que des graffiti en araméen et en phénicien, laissés par des visiteurs de l’Antiquité.

Ramsès II exerçant son fils aîné à dompter le taureau sauvage.

Une salle des barques (où on entreposait les barques divines), un abattoir pour les animaux de sacrifice avec une porte donnant directement accès à l’extérieur, divers magasins, complètent cette aile.

 

L’Osireion ou « tombeau d’Osiris »

Le temple de Séthi Ier est complété à l’arrière par un édifice indépendant, tout à fait unique dans sa conception. Il est connu sous le nom d’Osireion et forme le cénotaphe proprement dit du pharaon.

Plan de l’Osireion.

La construction de l’Osireion a été entreprise par Séthi Ier pour lui servir de cénotaphe ; elle a été poursuivie par Merenptah, mais elle ne fut jamais achevée; ce temple joua un rôle strictement cultuel.

Son axe se confond avec celui du temple qui partage en deux parties égales la chapelle d’Amon et la grande salle osiriaque. L’Osireion est placé en contrebas, derrière le temple, à une profondeur d’environ 8 mètres ; il est construit en calcaire et en granit. Il devait être caché aux regards par une butte artificielle, couverte de végétation.

Coupe de l’Osireion.

De l’entrée située au nord-ouest, on accède à un long couloir (environ 100 m) faisant un angle droit qui porte sur les murs, des textes religieux tirés, à l’est, du Livre de ce qu’il y a dans l’Hadès et, à l’ouest, du Livre des Portes. On parvient dans un premier vestibule terminé par une petite salle puis dans un second vestibule dont la décoration reproduit des scènes empruntées au Livre des Morts ou au Livre de sortir au jour. On aboutit à une salle transversale et à la Grande salle de 30 m de long sur 20 de large environ ; soutenue par deux rangées de cinq piliers massifs de granit rose qui ont seulement 3 m de haut, et une section presque carrée. La salle est entourée d’un fossé et de dix-sept petites niches, creusées dans le rocher.

L’intérieur de la salle constituait symboliquement une sorte d’île, figuration de la butte primordiale jaillie de l’océan originel d’où émergea le cosmos ; ce mythe de la création n’était pas sans rapport avec le culte d’Osiris. Deux escaliers conduisent à la nappe d’eau. C’est l’eau du Nil qui remplissait le fossé, mais semble-t-il, dans l’Antiquité, seulement à certains moments de l’année. Deux cavités (rectangulaire et carrée) étaient aménagées au centre de l’île sans doute pour placer un sarcophage et une boîte à canopes fictifs, qui simulaient ainsi le tombeau d’Osiris.

L'Osireion.

La dernière salle latérale en forme de sarcophage et au plafond en dos d’âne, symbolisait sans doute le cénotaphe de Séthi Ier, par sa forme. Sur les murs et le plafond, on observe des peintures symboliques, en rapport avec la cosmogonie égyptienne : Chou, le dieu de l’air, soulève la déesse du ciel, Nout ; une liste astronomique des décans et constellations représente le circuit nocturne du soleil dans sa barque ainsi que la résurrection de Séthi.

L’ensemble de ces édifices était entouré d’un mur où s’ouvrait au sud-ouest un pylône, symétrique de celui qui donnait accès dans la première cour. Dans l’angle nord de l’enceinte, on a retrouvé quelques restes du temple que Séthi Ier avait édifié à la mémoire de son père, Ramsès Ier.

 

LE TEMPLE DE RAMSES II

A environ 300m, se dresse le sanctuaire de Ramsès II. De moindres dimensions que celui de son père, il en reproduit toutefois l’idée : s’ériger un ex-voto pour commémorer son pèlerinage dans la ville sainte d’Osiris. Malgré le fait que l’édifice ait perdu tous ses plafonds et qu’il ne soit conservé que ses assises inférieures, il s’agit d’une des constructions les plus soignées du règne de Ramsès II : les reliefs, qui ont conservé pour la plupart leur éclatante polychromie, sont traités avec une délicatesse peu habituelle dans l’art ramesside. Ainsi, de salle en salle, on navigue entre des images cultuelles, des scènes d’offrandes et de très belles processions de personnifications féminines et masculines du Nil portant à bout de bras les produits du fleuve.

Le cartouche de Ramsès I dans la 1ère cour.

Plan du temple de Ramsès II

Dans la première cour détruite, on voit les restes du premier pylône et d’une petite chapelle. On pénètre par le second pylône dans la deuxième cour entourée de piliers osiriaques sur trois côtés et par un portique surélevé sur le quatrième. Le reste du temple est conçu selon une symétrie parfaite, les deux salles hypostyles, chacune à huit piliers, desservent à droite et à gauche des chapelles latérales. Le sanctuaire se compose de trois chapelles.

S’ouvrant directement sur le portique, quatre chapelles, deux à droite et deux à gauche, sont consacrées au culte royal. À gauche, deux chapelles pour la statue du culte de Séthi, sa barque et les ancêtres du roi ; à droite, deux chapelles pour la barque de Ramsès II, sa statue de culte et celle d’Hathor. Devant le sanctuaire, demeure une stèle en albâtre et au fond de la chapelle du milieu, un groupe sculpté en granit gris comportant Amon, Séthi, Ramsès, avec deux autres personnages difficilement identifiables. Les autres chapelles étaient consacrées à d’autres divinités, en particulier Osiris. Le temple abritait également des magasins pour entreposer les objets du culte.

Parmi les reliefs, on remarquera particulièrement ceux de la première salle hypostyle : le roi pratique une offrande à Osiris ; les statues des dieux sont conduites au temple et y sont honorées lors de la procession d’Osiris. Le poème de Pentaour, récit de la bataille de Qadesh, avait été gravé sur le mur extérieur nord, ainsi qu’une seconde liste royale, aujourd’hui conservée au British Museum à Londres. A noter la scène du comptage des mains qui s’étend sur trois registres.

 

 

Au sud, un long texte concerne la construction du temple et les dotations faites en sa faveur. Ici comme ailleurs, Ramsès II a choisi les matériaux avec soin : les murs sont en calcaire ; les encadrements des portes en granit noir ; les piliers sont tous taillés dans le grès le plus rare.

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