Aménophis III

(-1391 à -1353)

Statue d'Aménophis III (Musée de Louxor).

 

Nom d'intronisation

Neb-maât-Rê {Rê est le possesseur de Maât}.

Nom de naissance
 

Imen-hotep {Amon est satisfait}.

Manéthon et épigones: Aménophis III {Aménophis}.

 

Fils de Thoutmosis IV, son long règne de 38 ans est synonyme de paix, richesse et puissance. Héritier d'un immense empire allant de la Syrie à la Cinquième Cataracte, il noua d'importantes relations diplomatiques avec l'étranger. Les nombreuses réalisations architecturales de ce roi raffiné témoignent de son règne fastueux.

Buste d'une statue en pied d'Aménophis III.
(Musée de Louxor)

Aménophis III portant la Couronne Bleue.
Quartzite (Metropolitan Museum of Art)

Une famille bien connue

Fils de Thoutmosis IV et de la reine Moutemouia, Aménophis III (Amenhotep en égyptien) est le neuvième pharaon de la XVIIIe Dynastie. Il accède vraisemblablement très jeune au trône. Au plus tard en l'an deux de son règne, il épouse Tiyi, roturière originaire d'Akhmîm, en Moyenne égypte. Femme de caractère, elle participe étroitement à la conduite des affaires. Le couple royal, dans la version colossale du musée du Caire, exprime bien l'image d'une complémentarité qui fera défaut à la XIXe dynastie. Elle donna au roi au moins deux fils, Thoutmès, mort avant son père, et Aménophis, le futur Akhénaton, qui monta sur le trône sous le nom d'Aménophis IV. Quatre filles sont nées de cette union, dont Satamon, qui à la fin du règne remplit le rôle rituel dévolu à la reine.

Les statues colossales d'Aménophis III et Tiyi (musée du Caire).

La reine Tiyi

La reine Tiyi, en tant que « grande épouse royale », joue un rôle particulièrement important, souvent présente aux côtés de son époux dans l'iconographie.

Elle n'est pas d'origine royale, mais fille de hauts dignitaires. Son père, Iouya, est notamment « chef de la cavalerie », « prêtre de Min », et « père divin ». Sa mère, Touyou, est « grande des recluses d'Amon », et « grande des recluses de Min ». Quant à son frère Anen, il a la charge de « deuxième prophète d'Amon » à Thèbes. Il est exceptionnel d'en connaître autant sur la famille d'une épouse royale. C'est peut-être l'indice de la mainmise d'un clan aristocratique sur les plus hautes fonctions de l'État. La tombe d'Iouya et Touyou est l'une des rares tombes de particuliers à avoir été creusée dans la Vallée des Rois.

Pour la première fois on donne à la reine un caractère divin. Elle est la première à qui des temples ont été consacrés à Sedeigna entre les deuxième et troisième cataractes.

L’importance de Tiy n’est pas purement rituelle ou éponyme ; la correspondance d’Amarna révèle, en effet, qu’elle mena la diplomatie égyptienne quand la maladie diminua son époux à la fin de son règne, et exerça une régence de fait, sinon de droit. Elle fut l’initiatrice des grandes réformes religieuses qui poussèrent Aménophis IV (Akhenaton), son fils, à développer le culte d’Aton à l’échelle nationale. Elle ne mourut qu’après l’an VIII du règne de son fils. Tiy fait partie de cette galerie de magnifiques reines égyptiennes dont le rôle est toujours débattu.

 

La reine Tiyi (musée du Louvre).
stéatite glaçurée
H. : 29 cm. ; L. : 12 cm.
Fragments d'un groupe royal dont il ne reste que la reine.

La statue de la reine Tiyi
découverte en janvier 2006 dans le temple de Mout à Karnak par des archéologues de l’Université américaine John Hopkins.
granit noir - hauteur : 1,5 m.

Le renforcement de la nature divine du roi

Plus que ses prédécesseurs, Amenophis III développe sa propre divinisation. Il puise pour cela dans l'héritage idéologique de l'Ancien Empire et fait ériger un grand nombre de statues colossales (dont certaines font près de 20 mètres de haut, comme les fameux « colosses de Memnon »). A l'image des rois des grandes pyramides, il cherche à s'identifier avec le dieu solaire. Une de ses épithètes les plus fréquentes est « Aton resplendissant ».

En outre, il reprend et développe le mythe de la théogamie déjà mis en valeur par Hatshepsout. Sur le temple de Louqsor, qu'il reconstruit entièrement, il affirme son origine divine : Amon a pris l'apparence de Thoutmosis IV pour s'unir à la reine Moutemouia et lui donner naissance.

Lorsqu'en l'an 30 de son règne il peut célébrer un jubilé (fête sed), il fait entreprendre des recherches pour retrouver les rituels de l'Ancien Empire et organise une fête fastueuse, rompant avec la sobriété de la pratique de ses proches prédécesseurs comme Thoutmosis III. Deux autres jubilés ont lieu, en l'an 34 et en l'an 37. La fête sed est une institution très ancienne, documentée dès l'époque prédynastique, qui a pour objet de régénérer le pouvoir d'un vieux roi (normalement la première a lieu après 30 ans de règne), simulant une mort et une renaissance. Elle est devenu le témoignage de la faveur divine.

Constructions

Outre le temple de Louqsor, il fait construire le IIIe pylône à Karnak. A Thèbes-Ouest, son temple funéraire est garni d'imposants colosses (aujourd'hui ne restent visibles que les colosses dits de Memnon).

Aménophis III fut profondément attaché à Thèbes. Il installa son palais sur la rive occidentale, loin du clergé de Karnak, à Malqatta. Semblable à une petite ville, celui-ci couvrait plusieurs hectares à la limite des terres cultivées et ses portes ouvraient en direction de la cime thébaine. Bien qu'érigé à l'aide de briques crues, sa décoration permet de découvrir les traces d'un luxe inouï. La façade du palais se déployait sur un lac artificiel d'environ 1.000 m sur 2.500 m de côté, relié au Nil par un canal et formant le port où aboutissaient vraisemblablement les richesses d'Asie et de Nubie. C'est ce palais qui devait accueillir les cérémonies des fêtes sed.

Fragments de plafonds du palais de Malqatta.
(Metropolitan Museum of Art)

Pour de plus amples informations sur les recherches archéologiques qui sont menées dans ce palais par la "Joint Expedition to Malqata" co-sponsorisée par Michael C. Carlos du Museum at Emory University à Atlanta et The Metropolitan Museum of Art, New York : iMalqata

D'autres constructions sont connues à Heliopolis, Akhmim, Athribis, Bubastis, Saqqarah, Hermopolis, Abydos, Soumenou, Elkab.

Il fait également bâtir en Nubie, notamment à Soleb et Sedeinga, Eléphantine, Ouadi es-Seboua, Aniba, Kawa, Sesebi.

L'architecte le plus connu de l'époque est Amenhotep fils de Hapou, perçu de son vivant comme un sage et vénéré après sa mort comme un "saint intercesseur". Il reçut ainsi le privilège de faire construire son propre temple funéraire à proximité de celui du roi.

Un empire au zénith

Aménophis III hérite d'un empire qui s'étend de la Nubie à l'Euphrate. Son règne coïncide avec l'apogée économique et artistique de l'Égypte, qui croule sous l'apport de produits de luxe venant de l'étranger sous forme de tributs envoyés par les vassaux. Le pays vit une sorte d'âge d'or. La sécurité de ses frontières est garantie par l'existence de principautés et de royaumes gagnés à sa cause par une politique de cadeaux royaux, d'or nubien, d'échange de diplomates, le tout consigné dans les archives royales dans la langue diplomatique de l'époque : l'acadien, écrit en caractères cunéiformes. Le souverain égyptien, véritable potentat oriental, éblouissant ses visiteurs par un luxe et une cour thébaine raffinée, étend sa domination sur ce vaste empire, qui sera bientôt secoué dans ses bases lors de la léthargie politique du règne suivant.

Au début du règne, une série de grands scarabées commémoratifs est émise en grand nombre et envoyée partout, notamment à l'étranger. Ils vantent la puissance du roi (le scarabée de la « chasse aux lions » annonce que le roi a tué plus d'une centaine de lions avec ses propres flèches ; celui de la « chasse aux taureaux » mentionne 96 bovins abattus), la titulature du roi, l'origine de la reine et l'étendue des frontières de l'Égypte (scarabée dit du « mariage »), le raffinement de la civilisation égyptienne (le scarabée du « lac » indique que le roi a fait construire un grand lac pour la reine), et son alliance avec le royaume du Mitanni (scarabée de Kiloughépa).

Scarabée célébrant les chasses au lion d'Aménophis III (musée du Louvre).
l. : 7,90 cm. ; L. : 5,40 cm. ; Pr. : 3,40 cm.

Aménophis III noua des relations amicales avec la cour du Mitanni, pays devenu la première puissance asiatique de l'époque, en épousant Giloupéka, fille du roi. Ces liens matrimoniaux précieux, constituant un gage d'alliance, connurent un grand succès au cours de son règne : la soeur du successeur du roi de Mitanni rejoignant son harem, ainsi que celle du roi de Babylone, puis leurs filles respectives et finalement une princesse d'Arzawa.

Vieillissant et malade, Aménophis III fait l'objet de la sollicitude des cours voisines ; il reçoit la visite d'une image miraculeuse de la déesse Ishtar de Ninive, censée le guérir de ses maux. Cette diplomatie savante et pacifique empêcha sans doute le roi de prévenir la formation, sous l'emprise d'une nouvelle puissance régionale - les Hittites - d'une coalition de cités-états ; menées par le prince d'Amourrou, celles-ci étaient bien décidées à secouer le joug égyptien.

Le règne d'Aménophis III marqua une des apogées de la civilisation égyptienne. L'Égypte devient un pays cosmopolite, ouvert non seulement aux modes, mais aussi aux idées venues de l'étranger. L'art se libère de l'hiératisme, caractérisant les premiers règnes de la XVIIIe dynastie tournés vers des valeurs proprement égyptiennes de vigueur et de tradition, pour se tourner vers un art de cour témoignant de la douceur de vivre thébaine, et débouchant sur un maniérisme qui s'affirme à la période suivante.

Succession

Aménophis III avait un fils Thoutmosis, grand prêtre de Ptah à Memphis. Mais celui-ci est probablement mort avant son père, car c'est un fils cadet, Aménophis IV, le futur Akhénaton, qui lui succède.

Certains égyptologues proposent une corégence de près de 11 ans entre Aménophis III et son fils, se fondant sur des critères stylistiques. Cependant, la majorité des chercheurs considèrent cette hypothèse comme très improbable.

Sa tombe

La tombe royale (KV22) inaugure un ouâdi latéral de la Vallée des Rois, Bibân el-Gouroud (la Vallée des Singes). Son décor peint, réalisé sur un enduit, comporte une version complète du Livre de l'Amdouat, livrant les phases du périple de Rê dans sa barque, auquel participe le défunt royal. Bien qu'endommagé par les eaux de ruissellement, il livre encore les portraits d'un souverain représenté jeune pour l'éternité.

L'un des trois fragments de bas-reliefs prélevés dans la tombe d'Aménophis III et conservés au musée du Louvre.

Sa tombe n'est pas ouverte à la visite. Elle fait l'objet depuis 2002 d'un grand programme de restauration sous l'égide de l'UNESCO.

Pour plus d'informations sur cette magnifique tombe : Osiris.net.

Pour la protéger, sa momie a été transportée à la XXIe dynastie dans la tombe d'Aménophis II. Après la découverte en 1898 par Victor Loret de cette « deuxième cachette royale », elle est maintenant exposée au Musée du Caire.

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